29 janvier 2006

Le PLAN LOCAL D’URBANISME : Quel développement durable ? Quelle concertation ?

La majorité municipale ne cherche pas à exploiter cette formidable opportunité de bâtir avec la population un véritable projet de développement durable pour Martigues.

L’arrêt du projet du Plan Local d’Urbanisme et le bilan de la concertation publique associée étaient au programme du Conseil Municipal du 27 janvier. Le groupe Gauche Citoyenne s’est opposé à l’adoption de ce projet sans stratégie politique volontariste, accompagné d’un simulacre de concertation, très éloigné de l’objectif visé par la loi SRU : un projet global et participatif.

Le Contexte

En effet, la loi Solidarité et Renouvellement Urbain, dite « loi SRU », oblige depuis 2000 les communes à élaborer un Plan Local d’Urbanisme. Ce « PLU » n’est pas la seule réactualisation de l’ancien « POS » (Plan d’Occupation des Sols). Il est bien plus qu’un simple document d’urbanisme réglementaire. C’est un document de planification dans lequel doivent s’inscrire et s’affirmer les orientations, les stratégies, et les priorités politiques pour les 10 ans à venir visant un développement durable. Il exprime un projet de ville global économique, environnemental et sociétal. Bien sûr, la loi a prévu des modalités de concertation de la population afin de l’impliquer dans ce projet.

L’élaboration du « PLU » comprend trois phases principales :
1- la réalisation d’un diagnostic économique, démographique et environnemental du territoire,

2- l’élaboration d’un Projet d’Aménagement et de Développement Durable, le « PADD »,
3- l’explication des choix retenus pour le PADD et leur impact sur l’environnement.
4- L’élaboration des documents réglementaires (règlement d’urbanisme, cartographie..) définissant les contraintes d’aménagement sur les différentes zones du territoire. C’est l’équivalent de l’ancien « POS ».

Comment a-t-on répondu à Martigues ?

* Avec un Projet d’Aménagement et de Développement Durable et des choix d’aménagement comportant de graves lacunes et en particulier :
- aucune stratégie pour les mesures développement économique, qui apparaissent finalement comme un agglomérat de projets ponctuels successifs,
- aucune prise de position forte vis à vis de la réhabilitation de l’Etang de Berre, pourtant source potentielle d’activité économiques halieutique et touristique,
- aucun engagement politique affirmé et concret de la Ville visant à répondre aux deux enjeux environnementaux majeurs que sont la réduction des émissions de gaz à effet de serre et celle des consommations d’énergie.

* Avec une concertation minimaliste sans volonté véritable d’impliquer la population dans ce projet.

Tous les points ne peuvent être abordés en une seule fois et nos remarques, lors du Conseil, ont porté sur l’indigence des moyens de concertation mis en œuvre, ainsi que sur l’absence de politique «déplacement » et « énergie » de la Ville dans le PLU.

Pas de véritable concertation

Le PLU devant être un projet de ville, la portée fondatrice d’un tel document aurait dû susciter l’organisation d’un large débat politique et public. La loi donne les prescriptions minimales de concertation.
Certaines collectivités (Joinville, Rochefort...) ont, en plus, organisé une réunion publique et des réunions de quartier au moment de l’élaboration, et non après coup, de chaque étape (diagnostic, PADD, Projet PLU ). D’autres, comme Nantes, ont aussi adressé des questionnaires à la population. La plupart ont fait une réelle publicité au projet au fur et à mesure de son élaboration, en mettant en débat les enjeux, via leur site internet, et pas uniquement via l’affichage réglementaire.

A Martigues, on a sûrement appliqué la loi, mais a-t-on vraiment réussi une véritable concertation ? Que le cahier mis à disposition de la population n’ait recueilli que 3 ou 4 remarques et que la réunion publique de clôture n’ait rassemblé qu’une maigre vingtaine de personnes, sur les presque 45 000 habitants de Martigues, sont deux signes largement éloquents. Aucune véritable participation des citoyens dans l’élaboration du projet pour leur ville n’a été sollicitée. Pourquoi n’y a-t-il pas eu de réflexion dans les conseils de quartier ? Bien qu’en pleine phase réglementaire de concertation, les comptes-rendus des dernières réunions de quartier de décembre n’en parlent même pas. Comme à chaque occasion de concertation, le choix est fait de ne faire que de l’information sur des projets ficelés et non pas d’impliquer la population dans leur élaboration. Cette pratique est d’un autre âge.
Au niveau du débat politique, cela n’est guère mieux. A Martigues, en dépit de toute logique de projet, on nous a proposé en 2003 un PADD avant même que le diagnostic d’état des lieux soit réalisé et présenté. Aucun débat n’a été véritablement engagé par les élus après l’intervention de notre groupe. Le Maire a immédiatement soumis la question au vote.

Pas de politique « déplacements »

La réduction des émissions de gaz à effet de serre passe par la question du transport :
A Martigues, où les problèmes du stationnement et des accès aux écoles sont soulevés à chaque réunion de quartier, sans trouver de solution, le PADD n’aborde pas la réflexion sur comment rendre la voiture personnelle de moins en moins nécessaire en ville. Certes, il mentionne l’éventuel projet de gare multimodale à Croix Sainte et propose des plans d’aménagement de zones avec des tracés de modes « doux » (pieds, vélo, rollers...) ou de transports collectifs. Mais ce n’est pas une approche politique responsable de la question, ni crédible, ni lisible pour les administrés.
Dans leur PADD, nombre de municipalités de toutes tailles et de tous bords politiques (Toulouse, Bordeaux, Nantes, Rochefort, La Seyne-sur-Mer...) ont placé dans leurs axes prioritaires d’actions la maîtrise de la mobilité urbaine avec de véritables propositions concrètes en termes d’alternatives à la voiture, d’aménagement des voies urbaines redistribuant l’espace aux piétons, aux vélos et aux transports en commun, avec une véritable réflexion sur un développement de l’urbanisation réduisant les besoins de déplacement, et une politique du stationnement adaptée.

Le fait que la CAOEB, qui a la compétence transport, engage une démarche de Plan de Déplacement Urbain (PDU) n’empêche pas, bien au contraire, Martigues d’avoir sa propre réflexion et une politique affirmée. D’autres communes, dans le même cas, n’ont pas fait l’économie d’un axe prioritaire de réflexion sur le déplacement, tout en le positionnant d’ores et déjà dans le cadre de la réflexion du PDU de l’intercommunalité.

Pas de politique « énergie »

Aucune perspective de réduction de la consommation, ni d’utilisation d’énergies renouvelables. Pourtant les technologies permettant l’une et l’autre existent et sont opérationnelles. Réaliser des bâtiments selon les principes de la Qualité Environnementale des Bâtiments et de la Haute Qualité Environnementale permettent, entre autres impacts, de réduire leur consommation énergétique. Par ailleurs, deux dispositions spécifiques ont été votées le 15 juillet dernier, donnant la possibilité aux PLU de « recommander l’utilisation des énergies renouvelables pour les constructions neuves », et autorisant « une bonification du COS pour des travaux d’isolation thermiques ou d’équipement en énergie renouvelables ». Malheureusement, à Martigues, ces dispositions ont été délibérément ignorées dans le PADD, sous prétexte que l’absence de décrets d’application empêche la traduction de ces dispositions dans le règlement d’urbanisme. Pourtant rien n’empêchait d’exprimer d’ores et déjà la volonté de mener une politique d’économies d’énergie !
D’ailleurs, d’autres villes ont déjà mis en avant, dans leurs choix de priorités politiques, la mise en place systématique de démarches de qualité environnementale pour les logements et même pour les ZAC (La Seyne-sur-Mer) et en ont inscrit les contraintes dans le règlement d’urbanisme (Toulouse).

Transport, énergie, il n’y a clairement à Martigues aucune volonté politique réelle de promouvoir auprès de la population des pratiques répondant à ces deux enjeux, ni même, et c’est encore plus grave, de les mettre en place au niveau de son patrimoine propre. Pourtant, n’est-ce pas le rôle d’une collectivité d’inciter à l’action, au moins par son exemplarité ?

Nous voyons que ce projet de PLU se limite, comme nous le craignions, à un POS un peu amélioré et sera bien loin de répondre aux enjeux d’un développement durable, dont tout le monde s’accorde aujourd’hui à reconnaître qu’il est urgent d’en asseoir les fondamentaux par le biais des collectivités locales.

Important : ce projet de PLU représente un travail colossal de la part des services techniques de la Ville. Nous tenons à préciser clairement que les critiques que nous sommes amenées à formuler sur ce projet ne s’adressent aucunement aux techniciens, dont nous saluons l’implication. Elles s’adressent aux élus qui n’ont pas donné à ce PLU sa véritable dimension d’engagement politique vers une urbanisation responsable tenant compte des enjeux de notre siècle.

Anne-Marie FRUTEAU DE LACLOS - Conseillère municipale de Martigues

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