Le conseil municipal du 27 juin dernier devait donner son avis sur l'implantation à Martigues d'une unité de production de biocarburant dénommée BIOCAR. Notre liste a émis de sérieuse réserves sur ce projet. Voici donc le texte intégral de notre intervention :
"Je m’étonne qu’un dossier de cette importance soit abordé dans des conditions aussi peu propices à un véritable débat, presque à la sauvette, en 68ème question de l’ordre du jour et avec une commission environnement réunie l’avant-veille du conseil. Un sujet pareil aurait mérité une réunion de l’ensemble des conseillers municipaux consacrée à ce seul sujet comme vous l’avez fait en d’autres occasions.
En effet, vous ne pouvez pas ignorer que la production de biocarburants de première génération suscite des interrogations et des oppositions de plus en plus fortes dans le monde entier pour plusieurs raisons.
D’abord, parce que le potentiel de production de biocarburant à l’échelle de la planète ne correspond qu’à un faible pourcentage des besoins en carburant, pourcentage bien inférieur aux économies qui pourraient être obtenues en modifiant nos modes de déplacements.
Ensuite, parce que les gains environnementaux supposés être apportés par ces biocarburants sont en réalité bien inférieurs aux chiffres annoncés et sont même parfois négatifs, si on tient compte de tous les impacts environnementaux au long de la filière de production.
Enfin, parce que nous mesurons dès maintenant les conséquences dramatiques du développement de ces carburants, tout particulièrement dans les pays les plus défavorisés. La production à usage énergétique entre en concurrence avec les usages alimentaires et provoque hausse des prix et famines dans de nombreux pays. Elle conduit, notamment dans les régions du sud-est asiatique, à des déforestations massives qui se comptent en millions d’hectares. Ces déforestations aggravent l’effet de serre, conduisent à la disparition d’espèces protégées et ne profitent qu’à quelques grosses multinationales.
Le cas de la production d’huile de palme est un des plus graves. Il est responsable de 87% de la déforestation en Malaisie et de la disparition programmée de 16,5 millions d’hectares en Indonésie, au moment où les études internationales notent l’urgence de stopper la déforestation en zone tropicale. Or l’huile de palme importée de Malaisie et d’Indonésie sera justement une des sources d’approvisionnement de l’unité Biocar qui souhaite s’implanter sur notre commune.
Comment, dans ces conditions, ne pas s’interroger sur l’opportunité de donner un avis favorable à cette implantation ? Nous ne pouvons pas nous contenter de regarder la taxe professionnelle et les emplois dont notre commune va bénéficier au travers de ce projet en faisant l’impasse sur les dégâts qu’il va induire dans d’autres pays du monde et vis-à-vis de l’équilibre écologique de la planète. Face à de pareils enjeux, la seule exigence que vous nous proposez, à savoir l’installation de brûleurs à bas NOx, apparaît bien dérisoire !
Monsieur le maire, vous avez instauré pour ce mandat une délégation qui s’intitule non seulement « à l’environnement », comme durant le mandat précédent, mais également « au développement durable ». Or le développement durable c’est la prise en compte simultanée de l’économique, de l’environnemental et du sociétal. C’est la volonté affirmée d’adopter un comportement responsable à l’égard de l’avenir de notre planète et de ses habitants. C’est donner la priorité à la solidarité avec tous les peuples et avec les générations futures. C’est donc regarder plus loin que l’intérêt immédiat et égoïste de notre commune.
Comment pouvez-vous donner mandat à une de vos élues de travailler au Développement Durable et ignorer dans le même temps les conséquences environnementales et sociétales d’un tel projet ?
Un débat sérieux, documenté et contradictoire est indispensable avant de prendre position sur une telle question. Il n’a même pas pu avoir lieu en commission environnement où on nous a expliqué qu’il ne fallait parler que des impacts locaux du projet à l’échelle de notre commune et de ses habitants.
M. le maire, prenez le temps d’organiser une réunion de travail avec tout le conseil pour discuter à fond et sereinement de ce dossier et convoquez ensuite un conseil extraordinaire pour statuer définitivement dans les délais compatibles avec l’enquête publique.
Si vous maintenez une délibération immédiate, je voterai évidemment contre l’avis favorable qui est proposé."
Christian CAROZ
Conseiller municipal de Martigues
12 septembre 2008
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