05 avril 2006

Budget 2006 : Martigues doit préparer l'après pétrole

Lors du conseil municipal du 31 mars dernier, le vote du budget 2006 était à l'ordre du jour. Notre groupe est intervenu pour demander qu'une partie des finances communales soit utilisée pour préparer l'avenir, c'est à dire mener une action de développement économique volontariste afin de préparer l'ère de l'après pétrole qui interviendra dans une ou deux décennies, tout au plus. Voici le texte de notre intervention. Nous publierons prochainement le contenu de la réponse négative de la majorité municipale.

"Il y a quelques nuits, j’ai fait un rêve… ou plutôt… un cauchemar !

Je traversais une ville fantôme. Devant moi, se dressait un bâtiment majestueux, mais envahi par les ronces et dont les chauves souris étaient les seuls habitants. Le vent s’engouffrait en rafale par les fenêtres brisées. Un panneau, à moitié décroché, pendait encore sur la façade. On pouvait y lire une inscription partiellement effacée : « Hôtel de ville ».

Soudain, un bruit de moteur s’est fait entendre et un autocar est arrivé. Un groupe de touristes en est descendu. Ils venaient de Dubaï, un de ces émirats du golfe dont les gisements de pétrole, à présent épuisés, avaient fait la fortune. Ils étaient venus visiter une de ces cités, dont l’activité pétrolière avait assuré un temps la prospérité, avant que le déclin de cette source d’énergie ne la précipite vers une mort définitive .

Cette ville, que je parcourais en rêve, s’appelait-elle Martigues ? Je ne l’ai pas su…

Ce petit récit n’est, peut-être, qu’une fiction, mais il pose une question qui est, elle, bien réelle : notre cité ressemblera-t-elle, dans quelques décennies, à cette ville fantôme ou saura-t-elle prendre à temps le tournant de l’après pétrole ?

C’est la question majeure qui se pose aujourd’hui à nous et qui doit donc déterminer les priorités budgétaires de notre commune et de son intercommunalité.

Le monde regorge, en effet, de villes dont la richesse et le faste n’ont duré que le temps de l’activité industrielle sur laquelle elles étaient fondées : Potosi, en Bolivie, survit misérablement après l’épuisement de ses fabuleux gisements d’argent, Manaos, au cœur de la forêt amazonienne, ne conserve que son Opéra comme témoignage de la grande époque du caoutchouc, quant aux cités minières de l’ouest américain, ses saloons ne reçoivent plus aujourd’hui que des touristes.

Au contraire, certains petits Etats, tel que Dubaï, se sont déjà engagés à marche forcée dans le développement d’une nouvelle activité économique pour pallier l’épuisement prochain de leurs gisements de pétrole.

L’année 2005 a marqué, en effet, un sérieux coup de semonce dans le domaine énergétique. Tous les experts s’accordent aujourd’hui pour dire qu’un tournant irréversible a été pris. Le pétrole est devenu une matière première chère, parce que la demande excède durablement l’offre et que le plafond de production sera atteint d’ici 10 à 25 ans. A cette échéance, c’est tout le marché de l’énergie et, par voie de conséquence, également celui de la pétrochimie qui va se trouver bouleversé.

Or une à deux décennies, c’est un temps tout juste suffisant pour engager notre commune et notre intercommunalité sur la voie d’une nouvelle activité économique. Si nous attendons d’être confronté au problème de la décroissance ou de la disparition de nos activités traditionnelles, il sera trop tard. Nous devons anticiper. C’est au moment où nous bénéficions encore de la manne pétrolière, qu’il nous faut consacrer une part de ces ressources pour mener une action forte et volontariste en faveur d’un nouveau développement économique.

Ceci suppose des choix, notamment, puisque le domaine économique relève dorénavant de l’intercommunalité, d’augmenter le budget de la CAOEB au détriment du budget municipal.

Or ce choix vous ne l’avez manifestement pas fait. Vous nous avez réuni, le 8 mars dernier, pour nous présenter votre stratégie de développement économique. Nous n’avons pu que constater son absence. En fait de stratégie, vous nous avez dressé le tableau de la situation existante sans tracer la moindre perspective d’avenir, sans indiquer aucun objectif, ni les moyens pour les atteindre. Vous semblez croire que le fait d’aménager quelques terrains et locaux suffit pour mener une politique de développement économique.

Lorsque j’étais en charge de ces questions, j’ai tenté de vous proposer un programme d’action plus conséquent, vous l’avez refusé. Sans doute, aurais-je dû comprendre, à cette époque, que si vous aviez confié cette fonction à un élu socialiste c’est qu’elle était, pour vous, extrêmement mineure.

Votre approche de la question du développement économique demeure, en fait, très fataliste. Vous pensez qu’il sera impossible de remplacer nos actuelles grandes entreprises si elles venaient à disparaître. Tant qu’elles sont là, profitons en et laissons le soin aux générations futures de se dépatouiller de la situation qu’ils trouveront après nous !

Ainsi, votre budget semble aujourd’hui serein et confortable et vous en éprouvez certainement un sentiment de satisfaction. D’autant plus que le raffinage annonce de nouveaux investissements à Lavéra. Mais il ne s’agit que d’une vision à court terme qui fait l’impasse sur l’avenir.

Nous n’ergoterons donc pas sur le détail du budget que vous nous présentez, ce sont les grands équilibres que nous contestons.

Nous ne rajouterons qu’une remarque. Lors du débat d’orientation budgétaire, le mois dernier, nous avions souhaité que soient davantage prises en compte les attentes des martégaux. Nous avions cité quelques opérations prioritaires : la revitalisation du centre ville, la lutte contre le bruit routier et autoroutier, la construction d’une maison de retraite accessible aux personnes à revenus modestes, la création d’une maison de la vie associative… Nous ne constatons aucune avancée en ce sens dans votre budget.

En conclusion, parce que vous préférez les opérations de prestige à la satisfaction d’un certain nombre de besoins exprimés par les habitants et à la préparation de l’avenir, nous voterons contre ce budget."

Christian CAROZ
Conseiller municipal de Martigues

1 commentaire:

Anonyme a dit…

On peut aussi faire un rêve de cité engloutie par la montée des eaux issue des changements climatiques que nous aurons accélérés.
Faute d'avoir utilisé les ressources actuelles pour étudier et provisionner pour construire des équipements lourds et coûteux qui protègeront les villes du pourtour de l'étang de Berre.